![]() | Vincent Menuz PhD, Co-Founder - NeoHumanitas |
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02.10.2018-30.10.2018
Mourir: une faute morale?
L’ouvrage que je propose d’écrire s’attaque à l’un des pilier sur lequel la médecine contemporaine souhaite construire son futur : la prévention. En effet, la médecine occidentale est en train de passer d’une médecine « au lit du patient » (c’est-à-dire qui soigne des malades), à une médecine davantage préventive, où le soin est donné avant qu’une maladie ne se déclare. L’un des principaux problèmes que rencontre cette approche est la non-participation (non-compliance) des patients qui refusent souvent de suivre les recommandations préventives. Par exemple, il n’est pas simple pour un individu d’accepter de prendre des médicaments dans le but d’éviter une condition médicale potentielle, alors même que, n’étant pas objectivement malade, il ne ressent pas la nécessité d’un tel traitement. Le contexte social que je propose d’explorer permet d’articuler cette tension entre, d’une part, une médecine qui souhaite changer sa pratique et permettre à un plus grand nombre d’individus de vivre le plus longtemps possible grâce à la prévention et, d’autre part, des patients qui n’ont pas encore accepté ces changements d’objectifs thérapeutiques. L’objectif de cet ouvrage est de montrer qu’une telle pratique de la médecine participe à la mise en place d’un contexte social immortaliste où tout refus d’adhérer à un principe préventif – qu’il soit médicamenteux ou non – conduit l’individus à devenir responsable de sa mort. Autrement dit, on ne meurt plus « parce que c’est la vie », mais parce qu’on a failli à appliquer les recommandations ou les traitements préventifs qui nous étaient prescrits.
L’objectif de ce livre est donc avant tout d’articuler le contexte social très particulier qui place la mort humaine liée au vieillissement comme quelque chose d’inadmissible dans nos sociétés. Ensuite, il est de montrer qu’une telle attitude sert de justification pour (i) aliéner les comportements des citoyens, (ii) les responsabiliser face à leur mort et (iii) les inciter à ne plus être solidaire envers ceux qui n’adopteraient pas les comportements préventifs souhaités. Enfin, il est de proposer de revenir à des concepts fondamentaux de solidarités en rappelant simplement que ne pas être malade est davantage une question de chance que de mérite.